Insertion dans le puits d’assemblage d’une partie de la chambre À vide

Une « performance record » qui remet l'assemblage du tokamak sur les rails

La mise en place du module de secteur n°7 dans le puits du tokamak, le jeudi 10 avril, a été salué comme une « performance record » par le directeur général Pietro Barabaschi et considéré comme une « réalisation de haut niveau » par le chef du projet de construction, Sergio Orlandi. L'opération a conjugué la plupart des défis auxquels ITER doit faire face et surmonter pendant la phase d'assemblage de la machine.

Une vue réconfortante. « L'opération actuelle nous remet sur la bonne voie pour la phase d'assemblage de la machine », a écrit Jens Reich, responsable du programme d'assemblage de la machine ITER, dans un courriel adressé aux équipes.

Le module lui-même, l'un des neuf éléments qui, une fois assemblés et soudés, formeront l'enceinte à vide en forme de tore, est un objet technologique sans équivalent. Aussi haut qu'un immeuble de cinq étages et aussi lourd que quatre avions de ligne à pleine charge, il s'agit d'un assemblage complexe de composants inédits fournis par trois membres différents d'ITER : la Corée pour le secteur de chambre à vide au cœur du module et les panneaux d’écran thermique qui contribuent à son isolation ; et l'Europe et le Japon pour la paire de bobines de champ toroïdal qui complètent l'assemblage.

La création d'un module de secteur à partir de ces trois éléments majeurs—sans mentionner tous les autres éléments d'assemblage et les accessoires—est une opération de longue haleine. En 2021 et 2022, l'assemblage du module n°6 avait nécessité 18 mois de travail. (Installé dans le puits d’assemblage au mois de mai 2022, le module en avait été extrait 14 mois plus tard pour être réparé). Les nombreux enseignements tirés de cette opération initiale ont permis aux équipes de diviser par trois le temps d'assemblage du module n°7, le réduisant à six mois et dix jours seulement. Cet accomplissement a été célébré le vendredi 28 mars, les équipes s'engageant à faire « encore mieux pour les modules suivants ».

L'expérience acquise lors du levage, du transfert et de l'installation du premier module s'est également avérée précieuse. « La pierre angulaire de toute l'opération est la définition technique de la tâche, correctement documentée et bien comprise par les exécutants, explique Daniel Coelho, l’ingénieur de l’équipe d'assemblage qui avait coordonné l'opération il y a trois ans et qui l’a fait à nouveau la semaine dernière. Si la plupart des personnes impliquées ont pour responsabilité d'appliquer les règles et les procédures, nous devons cependant nous assurer qu’un certain nombre d’entre eux comprennent la logique qui sous-tend ces règles, afin d'évaluer correctement les déviations du processus qui peuvent survenir et de s'adapter en toute confiance en cas de besoin ». Pour renforcer cette approche, des « vétérans » des opérations du module n°6 aux mois de mai 2022 et juillet 2023, toujours présents sur le site d'ITER mais travaillant dans d'autres parties du programme, ont été temporairement réaffectés à l'opération de la semaine dernière.

Lorsque le module s'approche de l'ouverture de la fosse, l'espace libre entre le sol et le bas de la charge ne dépasse pas 25 centimètres.

Comme pour un avion de ligne, le « décollage » et l'atterrissage d'un module sont les phases les plus délicates du voyage. Mercredi, à la veille du transfert, les équipes ont répété la toute première séquence de l'opération. Appelée « pré-levage », elle consiste à soulever d'une cinquantaine de centimètres la charge de 1 350 tonnes, prélude à son extraction complète de l'outil de sous-assemblage (SSAT). Le pré-levage permet de tester minutieusement chacun des instruments et systèmes qui seront impliqués dans les différentes phases du transfert, de répéter les séquences initiales et de veiller à la coordination du personnel impliqué.

Jeudi matin, avec trois semaines d'avance, le transfert a pu commencer. Pour ceux qui avaient assisté à l'opération au mois de mai 2022, tout semblait s'être déroulé exceptionnellement vite et bien. Et ce n'était pas qu'une impression : bien que la charge se soit parfois déplacée à la « micro-vitesse » de quelques centimètres par seconde, elle a semblé atteindre le bord de la fosse du tokamak en un temps record. « Les ponts roulants se sont révélés beaucoup plus fiables, et n’ont pas occasionné le moindre retard, alors que nous avions subi deux heures d'immobilisation en raison de problèmes techniques en 2022 », explique Daniel Coelho.

En début d'après-midi, le module a entamé sa descente dans le puits d’assemblage, profond de 30 mètres. Imperceptible à l'œil, mais bien visible dans les vidéos en accéléré, le balancement de la charge dû à l'inévitable « effet de balancier » a rendu la dernière phase de l'insertion particulièrement délicate (voir l'effet de balancier dans la vidéo incluse dans ce numéro de Newsline). À certains passages critiques, l'espace libre entre le module et les éléments à l'intérieur de la fosse du tokamak ne dépassait pas quelques centimètres. « Ce n'est pas une promenade de santé... », sourit Daniel Coelho.

Huit autres modules de secteur sont attendus dans la fosse. La prochaine insertion (module n°6) est prévue pour juillet.

À 22 heures, le module ayant atteint le fond du puits d’assemblage et franchi le dernier obstacle technique majeur, les équipes étaient convaincues de pouvoir achever le travail en quelques heures. Une autorisation spéciale de la direction d'ITER leur a permis de prolonger le poste de de travail et, à 1h30 du matin, l'objectif de la journée était atteint : le module avait atterri en toute sécurité dans sa position temporaire. 

Quant au module n°6, il est actuellement en cours de réassemblage et doit être replacé dans le puits du tokamak au mois de juillet. « L’opération aujourd’hui nous remet sur la bonne voie pour la phase d'assemblage de la machine », a déclaré Jens Reich, qui supervise le programme d'assemblage du tokamak ITER.

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