Directeur général adjoint

Luo Delong, Administration

Bien des années plus tard, alors que le ministère de la Science et de la Technologie lui confiait la responsabilité du programme ITER, Luo Delong devait se souvenir du jour où, tout jeune, il avait lu dans un journal un article sur un « soleil créé par l'homme ». Sur le moment, ce texte avait « enflammé [son] imagination », mais il l'avait vite oublié. Luo Delong a grandi à une époque où la Chine avait d'autres priorités. Le développement de la production industrielle du pays était la plus pressante, ce qui explique pourquoi les parents du jeune garçon, tous deux ingénieurs en mécanique, étaient très souvent absents, le laissant à la garde de ses grands-parents. Son grand-père était mécanicien si bien que, baigné dans cet environnement familial, le garçon allait développer un goût pour« démonter et remonter les objets ». Dans un autre contexte, Luo Delong, qui a pris ses fonctions de directeur général adjoint d'ITER Organization (Administration) le 1er avril, aurait pu embrasser la même carrière que ses parents ou son grand-père. Les circonstances toutefois, allaient en décider autrement.
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Luo Delong—spécialiste des collaborations intergouvernementales dans le domaine de la science et de la technologie et ardent promoteur de la fusion—a été impliqué dans toutes les étapes du programme ITER depuis 2003. Il a pris ses fonctions de directeur général adjoint d'ITER Organization (Administration) le 1er avril.
Delong a travaillé d'arrache-pied pendant ses études secondaires ; il aimait étudier et obtenait de bonnes notes. À 16 ans, en dépit de son jeune âge, l'un de ses professeurs l'avait jugé prêt pour l'enseignement supérieur mais ses grands-parents, qui souhaitaient le protéger, lui ont demandé de patienter encore un an. Delong a alors passé, et réussi, son examen d'entrée et quelques années plus tard, à l'âge de 21 ans, il a obtenu sa licence en génie mécanique et s'est vu proposer un poste par le gouvernement. « Nous avions peu de choix à l'époque. J'ai opté pour la science et la technologie et commencé à travailler pour une bibliothèque affiliée au ministère de la Science et de la Technologie. Mon travail consistait à rédiger, en chinois et en anglais, des résumés d'ouvrages destinés aux étudiants et au grand public, ce qui m'a permis de me forger une culture et des connaissances dans de nombreux domaines différents. »


La Chine, comme tous les pays en développement à l'époque, avait besoin de se doter d'élites techniques et administratives. Après quelques années consacrées à son travail de bibliothécaire, Delong a été sélectionné par un programme de développement des Nations Unies dont l'objectif était de former des jeunes gens du monde entier et de les exposer à un environnement international. Au terme de deux années à l'université des Philippines, durant lesquelles il a amélioré sa maîtrise de l'anglais et obtenu une maîtrise en bibliothéconomie, le ministère l'a rappelé— le département de coopération internationale avait besoin de lui.

C'est ainsi qu'a commencé, pour Delong, ce qui allait être l'engagement d'une vie : la promotion et l'organisation de la coopération technique et scientifique entre les nations. De sa toute première affectation, une mission de trois ans comme attaché scientifique à l'ambassade de Chine à Oslo (Norvège), à son poste ministériel de responsable des relations avec les organisations internationales puis à sa nomination à la tête de la contribution chinoise à ITER, il a développé un talent exceptionnel pour motiver, négocier et, en cas de besoin, pacifier.

Bien avant d'être nommé directeur général adjoint d'ITER Organization (Administration), Delong était un familier d'ITER et du monde de la fusion. Dès la fin de l'année 2002, alors que la Chine posait sa candidature pour participer au programme, il a pris part à toutes les négociations et réunions d'experts qui ont précédé la création d'ITER Organization. Après avoir mis en place l'agence domestique chinoise « à partir de rien » en 2006, il a rejoint le comité consultatif pour le management (MAC) d'ITER puis assuré la présidence du Conseil ITER en 2020 et 2021. ITER n'a pas de secrets pour Delong. Il en connaît intimement les points forts et les points faibles ; il a pu mesurer les avantages et les inconvénients de sa structure organisationnelle et il est parfaitement conscient « du caractère crucial de la période actuelle ».

« De nombreuses problématiques restent à traiter », explique-t-il. Le COVID et « le reste » (c'est-à-dire les non-conformités de certains éléments essentiels qui doivent être réparés) ont causé des retards que les gouvernements trouvent parfois difficiles à accepter. « En termes de calendrier, nous avons fait des promesses difficiles à tenir. Nous devons aujourd'hui travailler pour conserver et retrouver la confiance de nos partenaires. »

Pour le nouveau directeur général adjoint (Administration), « ITER est une organisation scientifique et technique qui s'est progressivement muée en une structure de plus en plus bureaucratique. Les dossiers qui s'accumulent, toujours plus épais, la multiplication des réunions... Tout ceci n'est pas idéal pour assurer l'efficacité d'un projet d'ingénierie. À ce stade de l'histoire d'ITER, nous devons adapter notre culture. »

L'environnement extérieur a changé lui aussi. L'apparition récente de start-up spécialisées dans la fusion, les lourds investissements de fonds privés pour réaliser la fusion en un temps record, qu'ils soient fondés ou non, ont changé le regard de l'opinion publique sur la fusion et sur son projet phare. « Les 'plan décennaux' se multiplient. Nous devons en tenir compte afin de ne pas être perçus comme un programme dépassé. »

Luo Delong qui, durant sa carrière débutée il y a plus de 40 ans, a assumé diverses responsabilités administratives, géré des coopérations internationales et contribué à la construction et à l'exploitation d'installations scientifiques de premier plan (les tokamaks HL-2A, HL-2M et EAST), a le sentiment que les défis auxquels ITER est aujourd'hui confronté relèvent de ses « compétences fondamentales ». Mais il sait aussi par expérience « qu'un chemin difficile lorsqu'on le parcourt tout seul, le sera moins si l'on a des compagnons de route. » Et c'est exactement ce qu'il a l'intention de faire en suscitant une dynamique collective au sein d'ITER Organization.