Installation d’essai cryogénique des aimants

Un coup d’accélérateur vers la phase d’exploitation

Le programme de construction d’une installation d’essai cryogénique pour les aimants d’ITER mobilise des experts issus de toute l’organisation, qui travaillent de concert pour saisir une occasion exceptionnelle—celui de tester certains aimants et leurs systèmes associés à 4 K (moins 269°C).

Sur ce schéma de la future installation, nous voyons une bobine de champ toroïdal positionnée à l’intérieur de la chambre d’expérimentation (cryostat). Sur la droite, un autre aimant arrive sur sa remorque modulaire autopropulsée afin d’être lui aussi testé. Alors que les étapes de conception et d’approvisionnement sont validées les unes après les autres, l’installation devrait être prête dès cet été pour les premières opérations de mise en service.

Alors que la feuille de route ITER 2024 était en cours d’élaboration, il est apparu que le nouveau calendrier d’assemblage de la machine permettrait de réaliser des essais cryogéniques sur certaines bobines de champ toroïdal, ainsi que sur la plus petite bobine de champ poloïdal (PF1) et sur d’autres systèmes indispensables au fonctionnement des aimants. Mais un problème se posait : le créneau était si étroit qu’il fallait mener un programme de conception et de construction beaucoup plus rapidement qu’en temps normal. 

Pour atteindre cet objectif, une équipe regroupant des représentants de différentes unités d’ITER a été mise en place dès le mois de juin 2023 pour accélérer les phases de conception, d’approvisionnement, de fabrication et d’installation. Les grandes étapes de ce « programme à l’intérieur du programme » sont en passe d’être franchies et l’installation devrait être prête pour les premières opérations de mise en service dès cet été, si bien qu’elle recevra le premier aimant devant être testé à 4 K d’ici la fin de l’année.

La boîte de terminaison est l’un des éléments du système d’alimentation des aimants—un réseau complexe qui distribue et récupère des fluides cryogéniques à différentes températures et raccorde les aimants à leur alimentation électrique. Le fonctionnement en avance de certains composants de ce système sur le banc d’essai des aimants, comme cette boîte de terminaison qui a été positionné au mois de mars, apportera à ITER de précieuses informations sur leur fonctionnement à 4 K.

« En un peu plus d’un an et demi, soit moins de la moitié du temps habituellement nécessaire pour ce type d’opération, nous avons créé de A à Z un concept qui est aujourd’hui quasiment finalisé. Les équipements sont livrés ou en fabrication et les travaux d’installation sont en cours, explique Karim El Hamdani, qui pilote les efforts. Grâce à la réactivité de chaque élément de l’équipe, nous sommes parvenus à relever les défis et à mettre en place une équipe pluridisciplinaire qui réunit des spécialistes des aimants, des systèmes cryogéniques, de l’électricité, de l’instrumentation, du contrôle-commande, du vide, de la construction et de l’approvisionnement. Il s’agissait d’une priorité et chacun poursuivait un objectif clair, avec des délais extrêmement serrés. »

Implantée dans l’ancienne Installation de bobinage des aimants de champ poloïdal, le banc de test pour les aimants disposera de son propre cryostat et système d’alimentation pour refroidir les aimants à 4 K (moins 269°C) et les alimenter jusqu’à 68 kA. Ceci permettra de tester en conditions réelles différentes bobines verticales fournies par plusieurs fabricants de bobines et de conducteurs, mais aussi d’effectuer une « répétition générale » des systèmes auxiliaires (systèmes de distribution, systèmes cryogéniques, contrôle-commande, etc.) afin de réduire les risques associés à cette phase de la mise en service intégrée.

Voici comment une bobine de champ toroïdal sera préparé pour être testé dans le cryostat de l'installation d'essai à froid. Les essais à 4 K permettront de vérifier le fonctionnement de la bobine, mais auss de l'infrastructure associée, comme l'instrumentation.

La conception de l’installation d’essai a été finalisée en 2024, en collaboration avec un groupe d’experts internationaux. La plupart des composants sont aujourd’hui sur le site d’ITER et le programme évolue rapidement vers la phase de mise en service grâce aux progrès réalisés sur plusieurs fronts parallèles :

  • Cryostat : un cryostat sur mesure de 330 tonnes (10,5 m x 21,2 m x 6 m) est en cours de fabrication et près de 75% des travaux sont achevés.
  • Système d’alimentation électrique : un système sur mesure de 68 kA est pratiquement parachevé et les essais d’acceptation en usine sont en cours.
  • Systèmes cryogéniques et installations à vide : la fabrication de la boîte à vannes, des lignes cryogéniques et auxiliaires ainsi que des pompes, vannes et autres éléments est quasiment achevée et des simulations ont été réalisées pour le refroidissement et la montée en température des aimants de champ toroïdal.
  • Bâtiment : certaines activités de requalification sont en cours afin d’adapter l’ancienne Installation de bobinage aux besoins de l’installation d’essai. Par exemple, la grue portique doit être modifiée afin de permettre le levage des bobines de champ toroïdal (des essais, et une première tentative de levage, sont prévus au mois de mai).
  • Système d’alimentation : des éléments prévus pour le tokamak ITER ont été livrés à des fins de test. Puisque les bobines de champ toroïdal seront testées à l’horizontale et non dans leur position verticale définitive, une interface sur mesure est en cours de fabrication et devrait être livrée fin juin.
  • Instrumentation : le logiciel de détection des « quench » (pertes brutales de supraconductivité) est quasiment prêt et la fabrication des câbles et dispositifs à haute et basse tension est en cours ou finalisée.
  • Contrôle-commande : la conception du système central de contrôle est pratiquement achevée, le développement des logiciels progresse et les armoires de commande sont en cours de fabrication.
  • Ensemble de l’installation : l’équipe mixte qui a évalué les besoins/la conception de l’installation, effectué l’analyse préalable (structure, thermohydraulique, protection des aimants), et conçu les protocoles d’essai sera aussi mobilisée pour la mise en service et le fonctionnement de l’installation. Des experts de l’agence domestique européenne Fusion for Energy ont rejoint l’équipe pour la phase de conception et d’approvisionnement afin d’accélérer le processus. 
Une équipe diverse, comprenant des spécialistes des aimants, de la cryogénie, de l'électricité, de l'instrumentation, du contrôle, du vide, de la construction et de l'approvisionnement, est derrière la réalisation en un temps record de l'installation d'essai cryogénique pour les bobines. Sur la photo, les membres de l’équipe entourent Karim El Hamdani, chef de projet (au centre, jean clair), et Thierry Schild, ingénieur (derrière Karim, immédiatement à droite).

« Ce programme porte déjà ses fruits car il a permis de réunir toutes les compétences nécessaires au fonctionnement du système magnétique afin d’atteindre un objectif à court terme ambitieux et motivant, indique Thierry Schild, qui supervise les aspects techniques de l’installation d’essai. Nous avons déjà identifié de nombreuses problématiques d’interface et d’exploitation auxquelles l’installation nous permettra de répondre, nous apportant un savoir-faire extrêmement précieux pour la mise en service de la machine. »

Alors que les activités d’installation montent en puissance, l’installation d’essai cryogénique des aimants sera raccordée à l’usine cryogénique avant l’été et les essais de mise en service sans le cryostat devraient débuter en juillet. Les préparatifs pour les essais de la première bobine de champ toroïdal commenceront en septembre, une fois que le cryostat aura été livré et installé. L’installation devrait fonctionner pendant plusieurs années, chaque aimant la mobilisant pendant quatre à six mois.