La fusion

Réaliser la fusion en laboratoire

English: Interior of the JET tokamak, with and without plasma. Français: Photo de l'intérieur du tokamak JET, avec et sans un plasma.

Diverses associations d'isotopes d'éléments légers sont susceptibles de produire une réaction de fusion. Toutefois dans les tokamaks, c'est la réaction deutérium-tritium (D-T) qui se révèle la plus efficace.

La discipline scientifique qui est au cœur de la fusion est la physique des plasmas.

Lorsqu'un gaz est soumis à des températures extrêmes, les électrons sont séparés des noyaux et le gaz se transforme en plasma, le quatrième état de la matière. Un plasma est un gaz chaud composé de particules chargées (noyaux positifs et électrons négatifs). C'est un environnement ténu, près d'un million de fois moins dense que l'air que nous respirons. La plasma fournit l'environnement dans lequel des éléments légers peuvent fusionner et générer de l'énergie.

Trois conditions doivent être remplies pour obtenir la fusion au laboratoire : une température très élevée (pour provoquer des collisions fortement énergétiques), une densité de particules de plasma suffisante (pour augmenter la probabilité des collisions) et un temps de confinement suffisant (pour maintenir le plasma, qui a tendance à se dilater, dans un volume défini).

Dans le cas d'ITER, la réaction de fusion se produira dans un tokamak, une machine qui utilise des champs magnétiques pour confiner et contrôler le plasma chaud. La fusion du deutérium et du tritium (D-T) produira un noyau d'hélium, un neutron et de l'énergie.

Trois, deux, un... plasma ! L'intérieur du tokamak européen JET pendant et après son fonctionnement. Photo: UKAEA

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Plus de 99 % de l'Univers se trouve à l'état de plasma, notamment la matière interstellaire, les étoiles et le Soleil. Des exemples de plasma sur la Terre ? Les tubes de néon, les éclairs, les aurores boréales et l'éclat des téléviseurs à écran plasma.

Comment la fusion produit-elle de l'énergie?

Le noyau d'hélium est porteur d'une charge électrique. Il sera donc soumis aux champs magnétiques du tokamak et restera ainsi confiné dans le plasma. Toutefois, 80 % environ de l'énergie produite sera emportée hors du plasma par le neutron qui, n'étant pas chargé électriquement, demeurera insensible aux champs magnétiques. Les neutrons seront absorbés par les parois du tokamak, transférant leur énergie à ces dernières sous forme de chaleur.

Dans l'installation ITER, cette chaleur sera évacuée par des tours de refroidissement. Dans le prototype de réacteur de fusion (DEMO), qui succédera à ITER, ainsi que dans les futures installations industrielles de fusion, la chaleur sera utilisée pour produire de la vapeur et, au moyen de turbines et d'alternateurs, de l'électricité.

Le potentiel énergétique des réactions de fusion est supérieur à toutes les autres sources d'énergie actuellement exploitée sur Terre. La fusion d'atomes d'une manière contrôlée libère une énergie près de quatre millions de fois supérieure à celle que génèrent des réactions chimiques telles que la combustion du charbon, du pétrole ou du gaz naturel et quatre fois supérieure à celle de la fission nucléaire.

Des défis majeurs

ITER est conçu pour générer et maintenir dans la durée des réactions de fusion à une échelle qui permettra d’étudier la dynamique d’un « plasma en combustion » auto-entretenu. La difficulté toutefois ne se limite pas à cet objectif. Pour parvenir à une exploitation industrielle de l’énergie de fusion, plusieurs obstacles doivent encore être surmontés. Le rôle d’ITER, machine expérimentale, consiste précisément à relever chacun de ces défis dans le cadre d’une approche intégrée. La poursuite des activités de recherche et développement est indispensable pour concevoir un véritable réacteur de démonstration.

Des matériaux résistants aux conditions extrêmes : L’une des priorités des chercheurs est de développer, pour les structures et les éléments qui font face au plasma, des matériaux résistant à la dégradation induite par le flux neutronique généré par les réactions de fusion. Ces matériaux doivent pouvoir préserver leur intégrité structurelle dans les conditions extrêmes auxquelles ils sont exposés, tout en étant compatibles avec les exigences de pureté du plasma (l’intensité du flux de particules peut éroder la surface des matériaux). ITER va mettre en œuvre des matériaux avancés, adaptés aux conditions d’exploitation de la machine. En complément du retour d’expérience d’ITER, un important effort dans le domaine de la science des matériaux doit cependant être entrepris pour répondre aux besoins des futurs réacteurs de fusion industriels.

Avec l'aimable autorisation de Jamison Daniel, Oak Ridge Leadership Computing Facility

Gestion de rejets thermiques au niveau du divertor : L’un des principaux défis auxquels un réacteur de fusion industriel devra faire face consistera à gérer les flux de chaleur et de particules générés par le plasma. Dans la machine ITER, ces flux seront évacués par le divertor. Situé dans la partie basse de l’enceinte à vide, cet élément assure l'extraction de la chaleur et de l'hélium, ainsi que des impuretés présentes dans plasma, tout en protégeant la paroi intérieure de l’impact des particules. Les charges thermiques très importantes auxquelles le divertor est exposé représentent un défi majeur pour l’ingénierie d’une machine de fusion. Dans les limites actuelles de la technologie, ITER a su développer de nouvelles conceptions de divertor et de techniques de refroidissement. Des recherches sont en cours pour optimiser l'évacuation de la chaleur dans les futurs réacteurs de fusion.

Systèmes de télémanipulation pour la maintenance : La maintenance des futurs réacteurs de fusion constitue, elle aussi, un défi technologique majeur. Une fois la machine mise en service, les modifications, inspections ou réparations des éléments situés dans les zones activées ne pourront être réalisées autrement que par des opérations de télémanipulation. ITER va mettre en œuvre des technologies de télémanipulation avancées, mais garantir la fiabilité et l'efficacité dans l'environnement extrême des réacteurs de fusion de l’avenir reste un obstacle de taille. Les efforts de recherche et de développement actuels se concentrent sur la dextérité, l'agilité et l'autonomie des systèmes de télémanipulation. À terme, il s’agira de développer des systèmes de télémanipulation capables d'intervenir efficacement dans l'environnement d'une installation de fusion ainsi que d’aménager des espaces optimisés pour l’infrastructure de maintenance.

Cycle du tritium : Le tritium, isotope radioactif de l’hydrogène est l'un des deux éléments de la réaction de fusion deutérium-tritium (D-T). N’existant qu’à l'état de traces dans l'environnement terrestre, le tritium, dont la dont la demi-vie est de 12,3 ans, doit par conséquent être produit de manière artificielle. La maîtrise de la production et de l'extraction du tritium à l’intérieur même du tokamak est essentielle pour les réacteurs de fusion industriels qui viendront après ITER. ITER expérimentera la production de tritium par le biais de couvertures tritigènes et développera des technologies relatives au cycle du combustible, mais des recherches complémentaires sont encore nécessaires pour démontrer la faisabilité de la production de tritium à grande échelle.

Récupération de la chaleur et génération d'électricité : Bien que la quantité d'énergie produite par les réactions de fusion soit très importante, la configuration physique d’un réacteur (source de chaleur géométrique) rend cette récupération difficile. Dans les centrales thermiques ou les réacteurs nucléaires conventionnels (fission) Les systèmes de récupération d'énergie disposent d’une interface directe avec la source de chaleur. Dans un tokamak, une telle configuration n’est pas envisageable—la présence d’une interface perturberait gravement la dynamique du plasma et arrêterait instantanément les réactions de fusion. L'évacuation de la chaleur sera démontrée par ITER, mais il faudra poursuivre les recherches pour en augmenter l'efficacité dans la perspective d'une production efficace d'électricité.

Illustration artistique d'une central de fusion nucléaire alimentant une ville.

La quantité d'énergie produite par la réaction de fusion est environ 4 millions de fois supérieure à celle que génèrent des réactions chimiques telles que la combustion du charbon, du pétrole ou du gaz naturel.